Vivre avec un appareil auditif

Le blog qui vous aide à vivre une vie épanouïe avec des aides auditives

Oticon Own

Gérer l’Autophonation : un défi complexe pour les audioprothésistes

Temps de lecture : 4 min
22/10/24

L’autophonation, un phénomène qui reste méconnu, peut transformer l'expérience de port des aides auditives, surtout lorsque celles-ci sont intra-auriculaires.

Les aides auditives sont conçues pour pallier la perte auditive des patients. Cependant, il arrive parfois que ces derniers fassent l’expérience désagréable d’entendre leur propre voix trop forte ou déformée. C’est ce qu’on appelle l’autophonation.

Gérer les effets de l’autophonation peut devenir un véritable défi pour les audioprothésistes, notamment dans le cadre d’appareils sur-mesure intra-auriculaires type IIC, CIC, ITC ou ITE.

L’autophonation : un phénomène aux deux aspects

Percevoir sa voix amplifiée ou quelque peu déformée est une expérience qui peut être déroutante et inconfortable pour l’utilisateur d’aides auditives. Pour résoudre ce problème courant, il est important de comprendre qu’il existe deux types d’autophonation : l’autophonation active et l’autophonation passive, chacune ayant des causes et des solutions différentes.

  • Autophonation active : il s’agit du phénomène d’amplification réalisé par l’aide auditive elle-même : l’aide auditive capte la voix de l’utilisateur et la traite avec les autres sons de la scène sonore, créant un phénomène de sur-amplification. Cela est plus courant dans les appareils dits intras à cause de la proximité écouteur/microphone et la gêne peut être d’autant plus forte que la voix est grave.
  • Autophonation passive : ici, nous parlons plutôt de résonance interne de la voix, due à l’occlusion du conduit auditif. L’appareil auditif ou l’embout placé dans le conduit auditif crée une sorte de barrière qui ne permet pas à la voix de de dissiper vers l’extérieur de façon naturelle. Elle résonne alors à travers les os du crâne – comme le font les casques à conduction osseuse ou les implants osseux – et atteint directement l’oreille moyenne. Les personnes qui font l’expérience de l’autophonation passive rapportent avoir l’impression d’entendre leur voix de manière étouffée ou de ressentir de la résonnance dans leur voix, comme s’ils se bouchaient les oreilles.

 

Pourquoi les intras rendent-ils la gestion de l'Autophonation plus complexe ?

Les appareils auditifs sur-mesure dits intras sont plébiscités pour leur discrétion et confort mais peuvent être plus délicats à ajuster. La proximité dans l’oreille du (des) microphone(s) avec l’écouteur favorise un risque de Larsen. Il peut même être empiré par l’autophonation active, ce qui ajoute à la difficulté de réglage nécessaire pour assurer un confort d’écoute optimal au patient.

Mais des solutions existent pour contourner ces obstacles. Les derniers modèles d’intras chez Oticon, gamme Own, intègrent la technologie MoreSound Optimizer c’est-à-dire une technologie extrêmement rapide de prévention du Larsen  même sur des adaptations plus ouvertes permettant de supprimer le Larsen avant même qu’il n’apparaisse en interrompant la boucle de rétroaction ,c’est ce que l’on appelle un système proactif. En identifiant les risques potentiels de Larsen, l’appareil offre une plus grande flexibilité d’adaptation permettant ainsi de limiter les cas d’autophonation sans que le patient s’en aperçoive.

 

Identifier le type d’autophonation active ou passive

Afin de gérer au mieux ce phénomène, reconnaitre le type d’autophonation auquel l’utilisateur a affaire est essentiel. La manière la plus simple pour l’audioprothésiste lors d’un rendez-vous est de déterminer si l’on est en présence d’autophonation passive ou active est d’éteindre les appareils.

Si le patient se plaint malgré tout de résonnance après la mise hors service de l’appareil, il s’agira d’autophonation passive ou occlusion. Si la gêne disparaît, l’autophonation est alors dite active ou amplusion et sera liée à l’amplification de l’appareil.

 

Comment réduire l’Autophonation passive

L’autophonation passive, ou encore occlusion, survient lorsque l’appareil ou l’embout auditif bloque le conduit auditif, empêchant la dissipation naturelle des sons internes, notamment la voix de l’utilisateur, conduisant à créer une forme de résonnance interne, désagréable pour l’utilisateur.

La correction de cette autophonation passive se fera en jouant sur les caractéristiques acoustiques de l’appareil, afin qu’il bouche un peu moins le conduit, telles que la taille du venting ou la longueur de l’embout :

La correction de cette autophonation passive se fera par des réglages acoustiques :

  1. Réduire l’occlusion via un venting plus large : la solution typiquement utilisée est d’augmenter la taille du venting permettant une meilleure circulation de l’air et donc des sons internes dans le conduit auditif. Cela réduira la résonnance des voix. Cependant, cette approche doit être utilisée avec précaution pour éviter d’augmenter le risque de Larsen et limiter les performances de l’appareil telles que la réduction du bruit ou de la directivité car tout ce qui passe par le venting ne passera pas par le traitement de signal de l’appareil réduisant aussi l’accès aux indices de la parole. Il faut donc bien évaluer la gêne, être prudent car une gêne légère risque de se dissiper dans le temps tout simplement.
  2. Prendre en compte la profondeur d’insertion : si c’est un embout, il va être facile de jouer sur sa longueur mais si c’est un intra, cette option n’est pas réalisable. En revanche un intra Type IIC (invisible in the canal) qui va être placé plus en profondeur dans le conduit va permettre de réduire l’espace résiduel entre la coque et le tympan réduisant le risque d’occlusion.

 

Focus sur le venting : un équilibre à trouver entre confort et performance

Il appartient donc à l’audioprothésiste d’évaluer la gêne ressentie par le patient de façon rigoureuse afin de découvrir si sa sensation est vraiment gênante et persistante ou si elle peut disparaître avec le temps. En effet, l’agrandissement du venting peut impacter le confort d’écoute mais aussi les performances globales de l’appareil. Une conversation précise avec le patient sera déterminante dans la décision.

 

Réglages pour limiter l'autophonation active

En cas d’autophonation active ou amplusion, il faudra agir sur les paramètres de l’aide auditive pour diminuer la gêne ressentie par le patient. La vue audiologique dans Genie 2 permet d’observer l’amplification fournie par l’appareil sur la propre voix de l’utilisateur. Cette visualisation permet donc à l’audioprothésiste d’identifier les bandes de fréquences responsables de l'inconfort et d’ajuster les niveaux en conséquence.

Si l’amplification sur les fréquences moyennes est importante, alors il est recommandé de les réduire et d’évaluer si le phénomène continu, étant plus susceptibles de provoquer cette sensation de suramplification. Contrairement à ce qu’on peut croire, réduire les fréquences graves a, bien souvent, peu d’effet. En effet, ces fréquences sont, en général, peu amplifiées.

 

Exemple sur une vue audiologique :

Voici une petite astuce en cas d'autophonation active si vous hésitez à baisser les sons forts ou à baisser les sons faibles. Car cela dépend bien sûr de chaque cas. Même si le premier réflexe est de baisser les voix graves, la plupart du temps l'aide auditive n'amplifie que très peu la voix de l'utilisateur sur ces fréquences.

graphique

En passant sur la vue audiologique, la visualisation de la gêne devient plus évidente. Pour la trouver, cliquez sur la première icône entre les deux courbes de gain puis en dessous choisir « sa propre voix ». Cela permet d'avoir une vue d'ensemble sur l'amplification fournie par l'aide auditive sur la voix de l'utilisateur ; en d’autres termes, d’indiquer si l'amplification amène le spectre de la parole juste au-dessus du seuil d'audition ou bien plus loin.

Si sur les moyennes fréquences l'amplification est importante, il peut être intéressant de les baisser sur tous les niveaux d’entrée et de demander à l'utilisateur si le phénomène diminue. Si sa réponse est oui, on a alors la confirmation de travailler sur la bande de fréquences concernée.

L’analyse du spectre de la parole de la voix de l'utilisateur, banane grise, va alors aider à affiner le réglage sur les niveaux d’entrée concernés.

Prenons un exemple : sur le 1000 Hz le spectre est compris entre 40 et 70dB HL soit entre 35 et 65 dB SPL. Donc pas la peine d'aller modifier les Ne 80, juste les niveaux d'entrée 45 et 65 suffiront.

Enfin sur les hautes fréquences, il convient de regarder l’audibilité de la propre voix de l'utilisateur (zone grise). Si ce spectre ne dépassait pas ou peu le seuil d'audibilité du porteur et qu’avec les aides auditives, ce seuil est désormais un peu dépassé, le problème n'est pas dû à une suramplification mais au fait que ces fréquences sont de nouveau audibles grâce aux aides auditives. Un temps d'adaptation sera donc nécessaire.

 

Ne pas sous-estimer le pouvoir de l’habituation

Si le patient est un nouvel utilisateur, la gêne peut venir de sa découverte des appareils auditifs, notamment réentendre des sons qu’il avait perdus. Ces fréquences, auparavant inaudibles, peuvent devenir désagréables pendant une période d’adaptation, donnant l’impression que la voix est trop forte mais c’est en réalité le cerveau qui a perdu l’habitude de gérer ces fréquences. 

Dans ces cas spécifiques, réduire légèrement l’amplification sur certaines bandes de fréquence peuvent faciliter la transition. Lorsque le patient s’est habitué à son nouvel appareil auditif, il convient de rectifier les ajustements en conséquence.

 

Résoudre les gênes liées à l’autophonation n’est pas une science exacte et reste un chemin à parcourir main dans la main avec le patient. Cela suppose de trouver l’équilibre idéal entre confort auditif et performances de l’aide auditive pour une satisfaction idéale de l’utilisateur. 
Actualités récentes